Marée noire du "Prestige" : l'État français se pourvoit en cassation
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Marée noire du "Prestige" : l'État français se pourvoit en cassation
Paris veut faire reconnaître par la Cour suprême espagnole l’existence d’une infraction pénale d’atteinte à l’environnement
L’État français se pourvoit en cassation dans l’affaire de la catastrophe du pétrolier "Prestige", qui avait sombré avec sa cargaison de fioul en novembre 2002 au large du cap Finisterre.
C’est un communiqué tombé aujourd’hui des cabinets de Christiane Taubira, la garde des Sceaux, et de Pierre Moscovici, le ministre des Finances, qui aofficialisé la décision.
La France ne sera pas seule devant la Cour suprême espagnole. L’Espagne a elle aussi décidé de se pourvoir en cassation, une position déjà rendue publique par le procureur général espagnol.
Le 13 novembre dernier, le tribunal de La Corogne (Galice) avait relaxé les trois prévenus du chef d’accusation d’atteinte à l’environnement : le commandant du "Prestige" et son chef machiniste, tous deux de nationalité grecque, et l’ex-directeur de la marine marchande espagnole, José Luis Lopez-Sors.
Seul le commandant avait été condamné pour désobéissance. Car dans un premier temps, Apostolos Mangouras avait refusé le remorquage de son navire vers le large, conformément à la décision du gouvernement espagnol de l’époque.
Le gouvernement français rappelle que le coût de la marée noire, arrivée début 2003 sur les côtes françaises, est estimé à 109,7 millions d’euros pour les victimes, dont 67,5 millions supportés par l’État. Un préjudice impossible à indemniser à partir du moment où le tribunal de La Corogne s’est refusé à se prononcer sur la responsabilité civile des personnes poursuivies.
Par son pourvoi, l’État tient au contraire "à faire reconnaître par la Cour suprême espagnole l’existence d’une infraction pénale d’atteinte à l’environnement en raison des actes commis par le capitaine et l’équipage".
Le communiqué ne mentionne pas l’ex-directeur de la marine marchande. Or la relaxe de ce haut fonctionnaire au procès galicien a empêché d’actionner la responsabilité pécuniaire de l’État espagnol.
Dans la région, plusieurs victimes étaient parties civiles au procès. Le syndicat de protection du littoral landais, qui regroupe 17 des 18 communes concernées (sans Biscarrosse, qui était également partie civile au procès sous sa seule bannière), a lui aussi introduit un pourvoi devant l’Audiencia provincial de La Corogne.
Ce qui "sauvegarde le droit des collectivités locales à former le pourvoi devant la Cour suprême", indique Me Renaud Lahitète, l’avocat montois du syndicat. "L’attitude de l’État français est une bonne nouvelle. Elle témoigne de son intérêt pour la défense de l’environnement", poursuit Me Lahitète.
Au Pays basque, seules les communes de Bidart et de Saint-Jean-de-Luz étaient parties civiles à La Corogne. Les deux communes examineront la semaine prochaine la possibilité d’introduire un pourvoi.
Me Pierre Santi, l’avocat palois des communes de Bidart et de Saint-Jean de Luz, enjoint l’Etat français d’introduire un recours en cassation qui viserait également Jose Luis Lopez-Sors,l’ancien directeur de la marine marchande espagnole. Or le communiqué qui émane des ministères de la Justice et de l’Economie ne mentionne que l’équipage. Il se trouve que le procureur espagnol lui-même a toujours freiné des quatre fers à propos de Lopez-Sors. Le poursuivre en sa qualité d’ancien haut fonctionnaire signifiait que si sa culpabilité était retenue par le tribunal de La Corogne, la responsabilité pécuniaire de l’Etat espagnol pouvait être actionnée.
« Je n’imagine pas que la France ait formé un pourvoi sans en avoir parlé au préalable au gouvernement espagnol. Un pourvoi sans Lopez-Sors, c’est de la poudre aux yeux », tonne Me Santi, qui a toujours accusé l’Etat français de se désintéresser du sort des parties civiles françaises. « Envoyer la procédure en Espagne était une bourde monumentale. C’est bien la moindre des choses qu’il y ait un pourvoi. Mais il faut bien considérer la différence entre un appel et un pourvoi. L’affaire ne sera pas rejugée sur le fond.Elle va aussi engendrer des coûts procéduraux dont on se serait bien passé. Et on n’aura pas à la barre la compagnie pétrolière, pas plus que l’Etat espagnol. Comme à La Corogne, on va poursuivre des lampistes », proteste-t-il.